DOWN OVER THE UNDER

Bien malin celui qui aurait pu prédire ne serait ce qu’il y a 2 ans, alors que la Nouvelle Orléans commençait à peine sa reconstruction suite au désastre Katrina, l’arrivé d’un troisième album de Down. Pour ceux qui auraient loupé quelques épisodes, Down est une formation originaire de la Nouvelle Orléans dont les membres sont des amis d’enfance ayant sévis dans des groupes tels que Pantera, Corrosion Of Conformity, Crowbar et EyeHateGod. Bien plus qu’un simple all star band, Down s’est tout de suite imposé à la sortie de « Nola », son premier album paru en 1995, comme une entité à part entière. Malgré le succès de ce classique, Down a longtemps été mis de côté à cause des engagements de tous les membres du groupe au sein de leurs formations principales. Mais fin 2001 le groupe a réussi à accoucher d’un splendide second album nommé « II : A Bustle In Your Hedgerow » en seulement 28 jours pour ensuite retomber à nouveau dans l’inactivité après une année 2002 passée à défendre l’album sur les routes américaines. Avec un Phil Anselmo déchiré par le meurtre de son partenaire Dimebag Darrell le 8 décembre 2004 et sensiblement diminué par de multiples opérations dorsales, il semblait bien difficile d’entrevoir un avenir possible pour Down. Seulement voilà, après avoir été invité à jouer sur scène avec EyeHateGod à New York en 2005 et en découvrant avec émerveillement le groupe Withcraft, Anselmo a eu l’envie d’entamer sa renaissance et de reprendre contact avec Pepper Keenan, compositeur principal du groupe, afin de rompre 2 ans de silence entre les 2 hommes. La graine était semée. En opposition totale avec le processus de « II : A Bustle In Your Hedgerow », la conception de ce troisième album intitulé « Over The Under » aura demandé énormément de temps. Tout d’abord retardé à cause de l’ouragan Katrina qui a écarté pendant 3 mois les membres du groupe de leur ville, le groupe a ensuite entrepris sa première tournée européenne histoire de se remettre dans le bain et de retrouver l’inspiration. S’en suivra un processus d’écriture qui aura durer une grosse année afin d’aboutir à ce très attendu « Over The Under », produit une nouvelle fois par Warren Riker. On pouvait s’attendre à un album assez mellow, bourré de titres tristes calmes et dépressifs, mais Down prend ici tout le monde à contre-pied. « Over The Under » est en effet un album rentre dedans aussi accrocheur qu’agressif. Plutôt que de se lamenter sur leur sort, Anselmo et les siens nous livrent ici un opus qui traite d’adversité, de rédemption et de renaissance. Il est question ici de surmonter les épreuves difficiles de la vie sans pour autant les ignorer. C’est donc devant un album étonnamment positif que l’on se trouve même si Anselmo ne cache en rien ses regrets et ses démons du passé. Le son de l’album est chaud, mat et épais même si on peut reprocher par moment un mixage brouillon sur certaines parties. Si les riffs de l’album sont excellents, celui qui tire indiscutablement son épingle du jeu est Phil Anselmo. Très attendu au tournant, celui qui fût surtout connu pour être un sacré brailleur chante ici avec beaucoup de classe et d’émotion. Anselmo est un homme nouveau, désormais sobre et en quête de paix, ses paroles honnêtes et touchantes transpirent ici totalement dans chacune de ses vocalises. Une véritable résurrection pour quelqu’un que l’on croyait perdu à jamais dans les méandres de l’addiction. « Over The Under » démarre sur les chapeaux de roue avec une série de titres très accrocheurs. 3 Suns And 1 Star est d’hors et déjà un classique du groupe tant il ouvre l’album avec brio, la lourdeur de The Path ne manquera pas de vous mettre ko tandis que les uptempo énergiques de N.O.D et I Scream vous feront headbanguer à tue tête. Indéniablement un des titres les plus ambitieux de cet album, On March The Saints est assez représentatif de la musique du groupe. Dans un registre qui évolue entre rock sudiste, où la patte de Keenan se fait diablement ressentir, et le doom/sludge, avec un riff d’une lourdeur inouïe pendant le pont qui n’aurait pas dépareiller sur un album de Crowbar, On March The Saints s’inscrit tout simplement parmi les meilleurs titres composés par le groupe et rend hommage aux acteurs de la reconstruction de la Nouvelle Orléans. Même si l’accent est mis dans cet album sur la lourdeur et l’agressivité, Down n‘en oublie pas moins ses influences blues avec un Never Try de haute volée qui dévoile la versatilité dont les musiciens du groupe peuvent faire preuve et qui traite de la volonté d’Anselmo à soigner son dos. Dans cette lignée là on notera également le poignant Beneath The Tides, sur lequel Keenan nous gratifie de quelques parties de guitare slide avec un Anselmo au sommet de sa forme vocale. Un titre pour le moins épique. A l’inverse les 2 titres les plus agressifs de l’album sont sans aucun doute Mourn et Pillamyd. Le premier dévoile des riffs lourds sur lesquels Anselmo chante d’une voix écorchée la frustration qu’il a ressentie lorsque l’accès aux funérailles de son ancien guitariste Dimebag Darrell lui a été refusé. Quant au second, c’est une véritable déferlante sonique auquel le groupe ne nous avait pas habitué, littéralement drivé par un Jimmy Bower qui martèle ses fûts avec conviction. Après un In The Thrall Of It All efficace et entraînant, sur lequel Keenan et Windstein se livrent à quelques duels de solistes, l’album touche à sa fin avec le titre Nothing In Return. Sorte d’ovni ambiant et épique à la rencontre entre Pink Floyd, Led Zeppelin et Alice In Chains, le groupe conclut ici l’album avec une certaine beauté. Vous l’aurez compris, tout en évoluant une nouvelle fois, Down nous offre un excellent album doté comme toujours d’émotions profondes. Indéniablement un des incontournables de cette année 2008. A noter la présence d’un très bon titre bonus Invest In Fear sur la version digipack.

NOTE : 18 / 20