ACCUEIL
NEWS
INTERVIEWS
LIVE REPORT
CD REVIEWS
CONCERTS
FESTIVALS
BOUTIQUE
LIENS
E-MAIL

 

ANATHEMA

Entretien avec Vincent Cavanagh (chant, guitare)

17/06/08 - Paris

 

Anathema poursuit son chemin à sa manière depuis la fin de Music For Nations, donnant l’air de rien quelques concerts ci et là. Annoncé tout d’abord il y a quelques années, l’arrivée du vrai successeur d’A Natural Disaster commence à prendre des allures d’arlésienne avec une entrée en studio maintes fois repoussée. Pourtant cet espoir n’aura jamais été aussi proche et histoire de nous faire patienter, le combo atypique de Liverpool nous livre cet été un Hindsight qui revisite certains de ses classiques sous un autre angle. Vincent Cavanagh nous explique tout en nous faisant part de son énorme enthousiasme concernant l’avenir de son groupe.

Comment étais ce de rejouer avec Duncan Patterson (ex-Anathema, ex-Antimatter) à Paris et Lille après toutes ces années ?

J’adore ce mec, il est tellement marrant ! Sa présence est agréable. C’est un bon compositeur et un bon interprète. Il joue de la mandoline depuis un an et depuis, il est devenu une sorte de ménestrel voyageur (rires) ! Il se demandait s’il allait se souvenir des morceaux, mais il s’en est très bien tiré !

N’était-ce pas étrange pour lui de jouer des titres d’Anathema auxquels il n’a pas participé ?

Non car nous sommes des musiciens ouverts. Duncan joue tout un tas de choses différentes. Ces derniers temps il jouait des chansons irlandaises, une multitude de reprises et il donne des concerts en permanence. Il touche à beaucoup d’univers musicaux différents. Jouer sur des titres d’Anathema auxquels il n’a pas participé n’est absolument pas un problème pour lui. D’ailleurs, j’espère que la prochaine fois que l’on jouera ensemble, je pourrai chanter sur ses nouvelles chansons et essayer de les interpréter à ma façon.

Comment as-tu vécu la dernière tournée d’Anathema en compagnie de Porcupine Tree ?

Cette tournée a été très facile ! C’était fantastique de pouvoir donner un concert et aller ensuite dans le public pour avoir du bon temps et aller à la rencontre des gens. C’était super de pouvoir regarder Porcupine Tree soir après soir. Il s’agit de la tournée la plus professionnelle que nous ayons faite en ce qui concerne notre comportement (rires) ! Mon concert favori a été celui de l’Olympia. C’est le premier que j’ai remarqué dans la liste avant que la tournée débute. Je n’en croyais pas mes yeux lorsque j’ai appris que l’on allait jouer dans cette salle mythique. Tout cela a bien sur à voir avec le fait que Jeff Bucley y a enregistré un live (rires). J’ai adoré chaque seconde de ce concert mais c’est passé trop vite ! J’étais dégouté à la fin, je voulais jouer davantage ! Notre batteur John Douglas n’étais pas là car sa copine était enceinte et il a du quitter la tournée après la date de Bruxelles. Il est venu nous voir en nous annonçant qu’il allait bientôt être père, que le bébé était prêt à sortir ! Je lui ai dit : « John, je ne t’ai jamais vu tirer une tronche pareille ! (rires) ». A quoi il m’a répondu qu’il allait très bien, que c’était juste à cause de sa gueule de bois. Je ne l’ai pas cru évidemment. Il fallait vraiment voir son expression de visage (rires) !

Vous sortez enfin un nouveau disque avec Hindsight, qui est composé, à l’exception d’un titre, d’anciennes chansons réarrangées de manière plus douce. Est-ce un moyen de faire patienter les fans pour ce tant attendu nouvel album ?

Nous avons eu l’idée de faire un tel disque depuis des années. Mais nous n’avons jamais trouvé le bon moment et vu qu’aujourd’hui nous sommes libres de toute maison de disque, le timing était parfait. Il nous était possible d’enregistrer ce cd avec notre propre matériel et nous avons saisi cette opportunité car grâce à Hindsight, nous allons pouvoir nous acheter le matos nécessaire pour pouvoir enregistrer le vrai nouvel album ! C’est vraiment primordial pour pouvoir le sortir, sinon notre seule option serait de signer un contrat avec un label, mais nous n’en avons aucune envie ! On veut tout faire nous même et c’est donc une occasion parfaite. Par ailleurs c’est également le meilleur moment de sortir un disque comme Hindsight car Anathema est actuellement en pleine évolution et on peut montrer un visage différent de nos anciens morceaux, avec de nouveaux arrangements. C’était tout simplement un bon projet auquel s’attaquer. Nous sommes vraiment satisfaits du résultat. Ma motivation principale lorsque je fais un album et de créer quelque chose que je serai heureux d’écouter, et malheureusement ça n’a pas toujours été le cas pour moi dans le passé. Les autres membres du groupe ont probablement souvent été plus heureux de nos albums. Mais avec le prochain, tout le monde sera content. Il s’agira du meilleur disque de ma collection. C’est juste mon opinion personnelle. Si nous arrivons à accomplir tout le potentiel qu’ont ces nouveaux titres, nous n’aurons pas à nous soucier de l’avis des autres car nous serons comblés tant cet album sera bon ! Il y a une telle amélioration par rapport à tout ce que nous avons pu faire par le passé ! Peu importe si quelqu’un reste bloquer ou non sur nos vieux titres, il ne pourra nier cette énorme progression ! C’est un peu comme si nous devenions enfin une formation respectable (rires) !

On peut supposer que l’inspiration des arrangements de Hindsight vient des concerts acoustiques que toi et/ou Danny ont pu donner, n’est ce pas ?

Tout à fait car nous avons commencé avec Danny à donner des concerts acoustiques ensemble et cela nous a permis d’aborder une nouvelle manière de jouer ces titres. Cela nous a permis de pouvoir ajouter le violoncelle, le piano qui est très important dans ces nouvelles versions ou bien encore l’e-bow de Danny.

Pensez-vous interpréter ces versions sur une tournée ?

J’aimerai bien à vrai dire ! Mais il faut d’abord en parler à notre agent car à l’heure actuelle il veut surtout que nous sortions enfin ce nouvel album ! Il veut que nous partions à nouveau sur une grosse tournée. Il pense probablement ainsi car une tournée acoustique attirera moins de monde et génèrera moins d’argent. Il est peut être un peu égoïste mais il fait un boulot fantastique pour nous. C’est la seule personne que nous employons toujours depuis nos mauvais moments. Mais il est comme tout le monde et il veut ce nouveau disque pour que tout recommence comme avant ! J’espère que l’on callera quand même quelques concerts acoustiques, mais je doute sincèrement d’une tournée.

Comment avez-vous enregistré Hindsight ?

Nous avons installé notre propre matériel dans un bungalow perdu au milieu de nulle part dans le nord de l’Angleterre. Il n’y avait rien d’autre qu’une forêt, des chevaux et un parcours de golf autour de nous (rires) ! On avait une première pièce, qui était le studio principal, où Les bossait dur chaque heure de la nuit pour assembler le nouveau disque. Puis il y avait le second studio, qui était en fait notre salle à manger, où nous enregistrions le tout. D’un côté nous faisions Hindsight et de l’autre les démos pour le nouvel album. Je dois dire que Les a fait preuve d’une certaine patience ! Il a eu besoin de quelques pauses cigarettes accompagnées de café (rires). Je ne l’ai jamais senti aussi soulagé après avoir terminé un projet ! Mais il y avait tout de même une atmosphère détendue et tout le monde s’entendait bien.

Comment avez-vous choisi les titres de Hindsight ?

Certains étaient assez évidents. Je me souviens par exemple d’un dilemme entre « Looking Outside Inside » et « Leave No Trace ». Nous avons essayé les 2 mais « Leave No Trace » s’est imposé très vite. « Looking Outside Inside » est un bon titre mais nous, en incluant John qui l’a écrit, n’avons jamais été satisfaits par sa seconde moitié.

Préfères-tu certaines de ces nouvelles versions aux originales ?

Je pense que je préfère mon chant sur chacune de ces nouvelles versions. Surtout lorsqu’il s’agit de vieux titres comme « Angelica ». Je ne peux plus écouter Eternity (1996) rien qu’à cause de ma voix ! C’était la première fois que j’essayais de vraiment chanter et le résultat n’est pas terrible (rires). En plus on s’accordait vraiment bas à l’époque et tout me semble du coup très lent. J’ai l’impression d’écouter un disque qui tourne au ralenti ! Mais je sais que des gens apprécient cela ! J’aime bien les anciennes versions, mais étant donné que les nouvelles sont forcemment plus fraiches pour moi, je les préfère toutes.

Parlons maintenant du véritable nouvel album. Au début il était censé s’intituler Paradigm Shift et maintenant on parle d’Horizons

Ca c’est parce que Danny ne peut pas s’empêcher d’informer les gens de toutes nos idées ! Horizons ne sera pas forcemment le titre définitif. Tous ces changements font parti du processus créatif mais Danny fait ça en public alors que la plupart des groupes font ça en privé ! Danny semble vouloir tenir les gens informés de ce genre de chose et ça ne me semble pas nécessaire. Je préfère laisser les gens se poser des questions. Mais Horizons pourrait faire un bon titre car cela exprime bien cette nouvelle musique que je n’arrive pas à décrire. Pour moi, c’est comme si nous étions un tout nouveau groupe. La qualité des compositions est tellement meilleure ! Les riffs et les idées sont immenses ! Je suis littéralement soufflé par ce que l’on a crée. Je ressens cette émotion pure et profonde sur chaque titre de ce nouvel album. Ca te chamboule et cela te fait réagir différemment. Il y a des titres qui me transportent complètement, d’autres qui me donnent envie de crier en pleurant. Nous avons crée quelque chose de grandiose ! Mais c’est très dur de définir le style car chaque titre en possède un différent des autres. Par exemple, ce qui serait aujourd’hui notre second titre est tout simplement la chose la plus rapide et la plus heavy que nous ayons jamais fait ! Nous avons beaucoup de titres mais tous ne finiront pas sur l’album, bien qu’ils soient tous bons. Les nouveaux titres présents sur notre myspace ne seront pas forcément dessus. Nous cherchons le fil conducteur parfait, celui qui a le plus de sens et qui assure le meilleur déroulement possible au disque. Nous recherchons à assembler ces titres de la façon la plus cohérente qui soit.

Il ne s’agit plus d’un double album du coup ?

Non. Ce sera finalement un album normal. Nous voulons mettre entre 10 et 12 chansons dessus mais nous ne voulons pas qu’il soit trop long. Nous voulons qu’il soit succin et qu’il aille droit au but. Nous avons vraiment traversé un processus créatif ambitieux en remodelant chaque titre maintes et maintes fois. Mais nous pensons être enfin parvenus à trouver les titres de ce disque ainsi que leur ordre. Chacun se fera ensuite sa propre opinion, mais pour nous ce disque est comme une catapulte qui nous a envoyé dans une sphère complètement différente ! Nous entrons désormais dans le cercle fermé des groupes que je considère comme des Dieux. Tu vois ce que je veux dire ? C’est osé de dire ça n’est ce pas ? Et je ne l’ai jamais dit auparavant pour aucun album car je craignais les critiques. Mais je suis totalement convaincu aujourd’hui d’être enfin parvenu à un disque parfait !

Est-ce que tout le monde a été impliqué dans l’écriture cette fois, contrairement à A Natural Disaster (2003) qui a été composé uniquement par Danny ?

Oui sans aucun doute. Personnellement j’ai apporté beaucoup plus de choses que d’habitude. Danny et John sont toujours ceux qui proposent les idées initiales et les riffs. C’est à ce moment que j’interviens et que je les aide à transformer ces idées en chansons en arrangeant le tout. Mais nous ne touchons pas vraiment aux titres de Danny car c’est le genre de musicien à essayer plein de versions différentes de la même chanson et il choisi seul celle qu’il veut utiliser. Il sait exactement ce qu’il veut obtenir et tu n’as pas ton mot à dire (rires) ! Par contre je suis vraiment impliqué dans les idées de John. A vrai dire, il ne pouvait pas être là en permanence et du coup j’ai terminé le travail sur la plupart de ses chansons. Chaque membre est globalement plus impliqué et ce sera également le cas pour l’enregistrement. Jamie et Les se chargeront de la majeur partie de l’enregistrement et je les aiderai sur quelques trucs. Nous sommes tous multi-instrumentistes et il n’y a donc pas vraiment de règle sur qui joue quoi. C’est ouvert. Danny est le meilleur guitariste dans le groupe et il jouera évidemment la plupart des parties de guitare mais mis à part ça, on échange un peu les rôles.

Est-ce que Steven Wilson est toujours de la partie pour mixer le disque ?

Il veut le faire et nous espérons de tout cœur qu’il pourra. Mais il est vraiment très occupé. Du coup il se chargera probablement de quelques titres au lieu de mixer l’intégralité de l’album. Nous lui proposerons les titres qu’il désire en fonction de son envie et de son temps. Mais il tient à le faire car il connaît le potentiel de ces chansons. Il a déjà toutes les démos en sa possession et ils les adorent. Nous gardons les doigts croisés mais c’est difficile à dire pour le moment.

Quand comptez-vous commencer l’enregistrement ?

Dans vraiment pas longtemps. John est prêt à enregistrer la batterie dans un studio. Une fois que l’on aura récupéré ses pistes, nous pourrons faire tout le reste nous même dans un autre endroit. Je pense que l’on va donc commencer une semaine après le Hellfest, quelque chose comme ça !

Il vous faudra ensuite trouver une distribution…

Oui bien sur, mais ce n’est pas encore notre problème. Pour le moment nous devons accomplir notre mission d’un point de vue musical. Nous disposons d’une liberté totale grâce à notre situation. Cette musique mérite vraiment que l’on soit ambitieux et nous méritons de prendre enfin notre chance. Nous avons toujours fait parti d‘une niche au niveau du marché du disque. Je respecte tous ces labels qui nous ont fait des propositions récemment, mais il s’agit toujours des labels habituels et notre musique mérite mieux que de faire à nouveau parti d’une niche. Nous ne voulons plus vraiment appartenir à la scène metal européenne underground. Nous voulons atteindre le maximum de personnes et il y a un paquet de gens qui pourraient potentiellement aimer notre musique ! Notre problème a toujours été notre manque de professionnalisme pour tout ce qui concerne le business. Nous n’avons pas suffisamment donné d’interviews et nous ne faisons pas de sessions photo car nous détestons ça ! Nous détestons jouer le jeu ! C’était une fierté pour nous d’être anti-image et de nous cantonner à la musique mais cette attitude ne t’emmène pas très loin. Mais je pense que nos nouvelles chansons sont tellement bonnes qu’elles seront impossibles à ignorer même si nous ne faisons pas de sessions photo, et je doute que nous en ferons (rires) !

Vous avez joué 3 nouveaux titres (« Hindsight », « A Simple Mistake » et « Angels Walk Among Us ») pendant la tournée avec Porcupine Tree. Sont-elles un bon indice de la direction du disque ?

Non car toutes nos nouvelles chansons diffèrent les unes des autres. Aucune ne peut résumer le disque. Ces 3 là sont d’ailleurs très différentes, tout comme les 10 autres (rires) ! C’est comme lorsque les gens te demandent de décrire la musique que tu joues lorsqu’ils apprennent que tu fais parti d’un groupe (rires). Je ne sais rien dire d’autre que : « Je ne sais pas. Je suppose que l’on fait du rock. Nous jouons avec des guitares ! ». Et d’un autre côté c’est un peu cliché de dire que ta musique est difficile à décrire ! Par ailleurs, nous ne savons même pas si elles seront sur le disque même si au moins une de ces 3 devrait sans doute y figurer. Ca dépend de si elles s’intègrent bien au reste en fait.

Cet album a vraiment l’air de signifier beaucoup pour toi. Pourrais-tu me parler d’un titre qui est plus particulier à tes yeux ?

Cet album signifie absolument tout pour moi. Il y a ce titre que John a écrit et sur lequel il bosse depuis longtemps. Je pense sincèrement que c’est la meilleure chanson d’Anathema. Cela surpasse tout ce que l’on a fait auparavant en incluant même « One Last Goodbye » ! C’est une sorte de ballade assez sombre avec du piano classique. Il y a du chant masculin et féminin. La chanson est en 2 parties et la seconde moitié arrive un peu de nulle part et se transforme en une fin immense et épique. Il y a un riff de piano hypnotique, une boucle, la ligne de basse change soudainement et ça t’accroche. Ensuite la partie progresse infiniment jusqu’à ce qu’elle arrive à son paroxysme ! La fin dure à peu près 3 minutes. Elle devrait tétaniser l’auditeur. Lui faire ressentir un sentiment profond et effrayant. Quelque chose de viscéral, qui lui ferait presque souhaiter d’être malade ! C’est quelque chose d’intense !

Vous allez jouer un concert spécial avec vos vieux amis de Paradise Lost et My Dying Bride le 18 septembre à Paris. On peut imaginer que les vieux fans, s’attendent à une setlist en conséquence. Qu’as-tu à leur dire ?

Oui nous jouons dans le Bataclan qui est un de ces nouveaux endroits prestigieux pour nous. Cette date va évidemment amener de façon flagrante une certaine nostalgie mais nous allons jouer des titres que nous n’avons pas encore écrits ! Nous improviserons le jour même et il y aura de la trompette sur scène (rires) ! Plus sérieusement, nous n’avons pas encore réfléchi à la setlist. Nous savons rarement ce que nous allons jouer avant le jour même ! Cette date me fait marrer en tout cas (rires). A vrai dire je ne voulais pas faire ce concert au départ mais je dois avouer que je l’attends avec impatience maintenant ! Le nom est désastreux. Ca s’appelle The Unholy Trinity ! Vraiment aucune imagination (rires) !