MINISTRY Entretien avec Paul Raven (basse) 31/07/06 - Loges de la Locomotive - Paris

Comme vous pourrez le lire dans cette interview, Paul Raven est actuellement en mauvais termes avec ses camarades de Killing Joke. Mais pour le moment le bassiste fait parti du convoi anti-Bush qui écume les routes du monde entier jusque fin 2006 : Ministry. Une interview où j'aborderai donc en compagnie d'un Raven très sympathique, très lent et aussi très enfumé, le cas Killing Joke ainsi que la génèse de "Rio Grande Blood", dernier rejeton de Ministry, mais également "The Last Sucker" prochain album du groupe.

Salut Paul ! Quel effet ça fait de faire parti de Ministry ?

Oh ça fait vraiment du bien de faire parti de Ministry. J’ai toujours été un fan de la musique de Ministry. Je connais Al depuis des années et je connais aussi très bien Paul Barker et Cris Connelly d’ailleurs. Ce sont de vieux amis. C’est génial de faire parti de ce que je pense être un groupe de valeur.

Je suppose que cela devait faire un moment que vous parliez de travailler un jour ensemble…

Oui. Nous avons déjà parlé de tourner ou collaborer ensemble entre Killing Joke et Ministry à plusieurs reprises. On renvoi souvent ces 2 groupes à une sorte de « Big 2 ». Dans le passé avec Killing Joke, nous avons déjà joué un concert célèbre pour le nouvel an en compagnie des Revolting Cocks (ndlr : autre groupe de Al Jourgensen) à Chicago. Je pense que c’était en 1991. Cette nuit là, Al est mort et nous l’avons ramené à la vie. C’est pourquoi il m’a demandé de l’accompagner sur cette tournée (rires).

Habituellement, Al écrit pratiquement tout seul la musique de Ministry. Mais cette fois avec Tommy Victor et toi dans l’équipe, peut-on dire que « Rio Grande Blood » a été travail de groupe ?

Oui je pense. La plupart du temps Al est arrivé avec ses idées et Tommy et moi-même lui apportions nos idées qui collaient avec la musique de Ministry. Sur d’autres trucs Al nous dirigeait du genre : J’ai ces paroles pour Senor Peligro, je veux que vous fassiez ça. Malheureusement, Tommy et moi ne pouvions pas rester dans le studio suffisamment longtemps, alors nous avons travaillé toute la semaine des jours entiers pendant 3 semaines pour pouvoir faire cet album.

Il y a Mark Baker sur l’album mais ce dernier ne tourne pas avec vous. Une raison particulière ?

Je crois qu’il avait des choses à faire avec son propre groupe. Il était avec nous aux Etats-Unis car nous tournions avec les Revolting Cocks. Je pense aussi que certaines chansons ont été écrites en ayant Joey Jordison à l’esprit car Al parle de tourner avec Joey depuis un bon moment. Il n’y a rien contre Mark. Nous le respectons et c’est un bon batteur. Je pense plutôt que la raison principale est qu’Al s’était engagé à tourner avec Joey avant même que l’album ne soit crée.

Comme tu le dis, Joey Jordison est actuellement en tournée avec vous. En tant que bassiste, je suppose que c’est plutôt cool de former une section rythmique avec Joey…

Oh oui ! Le truc cool à propos de ça est qu' au moment où nous avons commencé à parler du dernier album de Killing Joke, nous sommes allés voir Slipknot à Birmingham. C’était en 2004 je crois. Nous les avons vu jouer puis nous sommes repartis vidés. J’étais littéralement soufflé. J’adore Slipknot, ils sont énormes. Ils sont encore plus gros que Kiss. Quand j’ai commencé à me mettre à la musique, j’adorais Black Sabbath et Led Zeppelin. Egalement des trucs comme Alice Cooper et Kiss. Mes potes étaient du genre : pourquoi tu aimes ces groupes de merde avec du maquillage ? Mais j’aime bien ce genre de groupes. D’ailleurs nous utilisons aussi du maquillage dans Killing Joke et Ministry. Quand j’ai vu Slipknot jouer, c’était vraiment colossal et j’ai compris pourquoi ils ont tant de fans à travers le monde.

Comment son intégration au sein du groupe s’est-elle passée ? Je veux dire par là, que le nom de Joey Jordison est aujourd’hui plus gros que celui de Ministry. Il doit demander beaucoup d’argent, ce genre de choses…

(Rires) Ouais, c’est sur qu’il ne tourne pas avec Ministry pour l’argent. Mais il a grandi en écoutant Ministry. J’admire ce qu’il a réussi à accomplir. C’est un type talentueux qui a eu d’hors et déjà beaucoup de succès. J’aime bien sa capacité à pouvoir jouer dans différents styles avec brio et ce n’est pas quelque chose de facile à faire. Au niveau de son jeu, c’est quelqu’un de très concentré qui fait bien les choses. C’est cool de l’avoir avec nous, je le considère comme mon égal et un membre à part entière de Ministry.

Une nouvelle fois Ministry détourne des discours de George W.Bush sur cet album. Quelle technique utilisez vous ? Car je doute que Bush ait un jour déclaré : I’m an asshole ! (ndlr : je suis un trou du cul en français)…

Pour le « I’m an asshole » en fait nous avons utilisé plusieurs discours. Nous avons isolé le « I’m an » d’un discours, puis le « ass » venant d’un autre mot dans un autre discours et il en est de même pour le « hole ». Al dit souvent qu’il y a cette limousine qui est arrivé un jour devant le studio, que George en est sorti et qu’il nous a rejoint pour faire quelques apparitions merdiques sur l’album (rires).

Evidemment le message de l’album est très clair et doit être très controversé aux Etats-Unis…

C’est ce que les gens disent. Il parait qu’il est difficile de trouver l’album en magasin à cause de la pochette. C’est comme ça, nous avons envoyé ce que nous avons envoyé.

Y a-t-il certains endroits aux Etats-Unis où vous êtes confrontés à de mauvaises réactions de la part du public ?

Non. C’est toujours excellent quelque soit l’endroit où nous jouons. Les gens s’amusent de différentes façons.

Je ne peux pas vraiment éviter le sujet Killing Joke. Que se passe-t-il actuellement entre toi et le reste du groupe ?

C’est surtout des problèmes d’emploi du temps. Je devais à l’origine faire la tournée avec Killing Joke, mais ils ont sorti l’album au mauvais moment pour moi car je m’étais déjà engagé avec Ministry. C’est ce que je fais en ce moment.

Killing Joke va tourner à nouveau pendant l’automne. Seras tu de la partie ?

Non car je serai moi-même en tournée avec Ministry au Japon et en Australie. Je suis pris jusqu’au 12 ou 13 octobre (ndlr : au moins jusqu’au 14 en réalité car Ministry est confirmé sur le festival Loud Park à Tokyo) et personne ne m’a sollicité pour la tournée Killing Joke. Si ils m’avaient demandé de le faire, je l’aurai peut être fait car j’ai assurément besoin d’un peu d’argent. Mais je pense ne pas à avoir d’engagements avec eux car j’ai essayé depuis très longtemps de leur parler de certains problèmes de business. Quand tu bosses avec des gars qui veulent un emploi du temps particulier qui fait qu’ils se font de l’argent et toi non, ou du moins pas autant qu’eux, cela pose un problème. Que ce soit quand Jaz bosse sur de la musique classique ou n’importe quoi d’autre. Tout ne tourne pas autour de l’argent bien sur mais tu sais j’ai des enfants et certains engagements envers eux. Je dois payer l’école, l’assurance médicale et tout ce genre de conneries que tu dois faire dans la vie. En fait si tu veux une réponse directe, j’ai senti qu’ils ont manqué de respect envers moi. Quand je ne me sens pas respecté, j’ai envie de tuer. Alors après j’ai le choix. Soit je deviens fou et je leur écrase la tête contre le sol soit je reste conscient et je suis ici en tournée avec d’autres gars. Qu’un mec considère que ses enfants doivent être mieux nourris que les miens après 25 ans à travailler ensemble, c’est de la branlette. Tu vois ce que je veux dire. Je n’essaie pas de manquer de respect à quiconque mais bon. Mais j’adore la musique plus que tout et je passe cela au dessus de toutes ces conneries. J’adore faire de la musique avec Killing Joke. Donc oui il y a des chances que je les rejoigne un de ces jours, mais c’est difficile car j’ai eu pas mal de pilules à avaler.

As-tu eu une contribution importante sur le dernier album de Killing Joke « Hosannas From The Basement Of Hell » ?

Oui assurément. Je veux dire… Geordie Walker n’a passé que 12 jours en tout dans le studio. Il faut parfois beaucoup de détermination pour faire un album, plus que créer la musique en elle-même. Cet album a été très difficile à faire pour tout le monde.

Mais au final « Hosannas From The Basement Of Hell » est très bon…

Oui je suis tout à fait d’accord. Je ne suis pas en train de pleurnicher. Mais à la fin de cet album, la première chose qui nous venait à l’esprit était de prendre un long repos. Je suis donc allé suite à l’enregistrement aux Etats-Unis, dans l’Oregon. M’allonger dans un taxi, faire du golf et aller voir l’océan pour m’aérer le cerveau. Cela a été très bon pour moi de travailler avec Ministry. Je savais comment travailler avec Tommy car il y avait déjà une alchimie musicale entre nous qui a fait succès par le passé dans Prong. Voir si cette alchimie entre nous existait toujours était quelque chose de vraiment intéressant. Je ne sais pas si tu as vu la vidéo sur l’enregistrement de l’album mais nous avons bossé sans cesse jusqu’à ce que nous tombions littéralement sur la console (rires). Nous avons fait ça pendant 3 semaines. Sur le prochain album nous formerons donc déjà un vrai groupe.

J’en conclut que le line up de Ministry sera le même sur le prochain album…

Oui absolument. Nous sommes des membres permanents de Ministry au moins jusqu’en 2007. Nous avons beaucoup à faire.

Tu évoques ce prochain album. Al a déjà déclaré que ce serait le dernier de l’histoire de Ministry…

Oui c’est possible. Il s’appellera « The last Sucker » et ce sera un double album. La pochette s’inspira du dernier souper (ndlr : last supper en anglais) avec bien sur tous ces enculés à la place de Jesus et des apôtres (rires). On retrouvera Donald Trump, toute l’administration Bush evidemment. Il y aura une marque de pied sur le cul de Bush pour le dégager par la porte (rires). Nous complèterons cet album avec un album de reprises qui sera composé uniquement de chansons que nous adorons tous et qui ont un contenu politique intéressant.

Comme Al le dit lui-même, Ministry ne fait que des bons albums lorsqu’un Bush est dans la maison blanche. Etant donné qu’après 2008 il est peu probable de revoir un Bush président, est ce pour cela qu’Al veut tirer sa révérence avec le prochain album ?

Oh tu oublies qu’il y a Jeb Bush (ndlr : gouverneur de Floride et petit frère de George W.) qui est aussi en politique. Ils trouveront bien un moyen de faire élire cet enfoiré président. Ils le transforment rapidement, il prend quelques photos avec Arnold Schwarzenegger et cet enculé se retrouve dans la maison blanche. Ou alors ce sera peut être cette pute d’Hillary Clinton avec son pénis rétractable d’alien (rires). Tu n’as pas vu ce truc sur Internet ?

Non désolé (rires). Avez-vous commencé à écrire « The Last Sucker » ?

Nous avons déjà pas mal d’idées sur ce que nous voulons faire mais « Rio Grande Blood » est encore assez frais. Je dirai que les roues commencent à créer du mouvement (rires).

En guise d’épitaphe, peut être un DVD live ou quelque chose comme ça ?

Oui absolument. Il y aura un DVD live filmé sur cette tournée qui sortira l’année prochaine.

Pour finir y a-t-il certains morceaux en particulier que tu es fier de jouer avec Ministry ?

C’est difficile de choisir. Evidemment j’adore jouer les morceaux du dernier album vu que j’étais directement impliqué dedans. Au début de la tournée le groupe n’était pas parfait, puis après quelques concerts tout le monde est au meilleur de sa forme et joue parfaitement et là tu es fier. J’ai particulièrement aimé jouer le titre Khyber Pass sur certaines dates américaines car nous étions rejoints par notre amie Liz Constantine qui apparaît également sur ce titre dans l’album. Jouer ce morceau en live avec elle était putain d’énorme. Pour une fois il y avait quelqu’un qui peut vraiment chanter dans Ministry, tu vois ce que je veux dire (rires). C’était excellent. C’est étonnant de voir le son qui peut sortir d’une petite chatte comme ça.

Merci à Paul Raven ainsi qu'à Jerome et Florian d'Underclass.