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DREAM THEATER

Entretien avec Mike Portnoy (batterie, choeurs)

04/10/07 - Lotto Arena - Anvers

 

En cette rentrée 2007, Dream Theater est actuellement sur les routes européennes pour défendre son 9ème album "Systematic Chaos". Pas mal de changements et de projets du côté du groupe cette année et qui de mieux que le maitre à penser Mike Portnoy pour nous expliquer tout ça ?

Salut Mike ! Tout d’abord, te sens tu plus jeune de 10 ans depuis que vous avez raccourcis la durée de vos concerts ?

(Rires). C’est sans aucun doute une bouffée d’air frais pour nous. En fait il s’agit plutôt d’une bouffée d’oxygène. Cela dit nous donnons toujours de longs concerts. Nous jouons minimum 2h00 et parfois cela va presque jusque 2h30. C’est quand même toujours assez long. Mais c’est évidemment bien mieux pour nous que de jouer 3h30.

Vous avez signé avec Roadrunner pour la sortie de « Systematic Chaos ». Pourquoi avoir quitté Warner ?

Hé bien notre contrat est arrivé à son terme. C’était un contrat de 7 albums qui a commencé en 1991 et qui a duré 15 ans. A chaque album, ils ont toujours choisi l’option de continuer avec nous, du coup ça a pris tout ce temps pour nous sortir de là (rires). Nous aurions aimé partir il y a déjà quelques années mais nous étions liés par contrat. Quand ce dernier s’est terminé nous étions plus qu’heureux de pouvoir être libres et de pouvoir étudier les offres d’autres labels. Roadrunner a été le choix naturel.

N’étais tu pas satisfait du travail de Warner ? Car pour un groupe de metal progressif vous êtes arrivés à une renommée qui dépasse toutes les espérances…

Non je ne suis pas vraiment heureux de la façon dont ils ont travaillés sur le groupe. J’ai toujours pris comme un compliment le fait d’être le seul groupe de metal progressif signé sur une major. Tous les autres groupes du genre étant signés sur des labels indépendants. Mais je n’ai jamais aimé l’univers corporatif des majors. Cet environnement ne convient pas à Dream Theater. Ils nous ont toujours gardés car nous avons vendus beaucoup d’albums et nous leur avons rapporté énormément d’argent, mais je pense vraiment qu’ils n’ont jamais rien fait pour nous promouvoir ou nous ramener de nouveaux fans. Nous avons tout fait nous même à travers nos tournées et par le biais de notre fanbase sur Internet. Nous sommes donc heureux d’arriver aujourd’hui dans un label qui nous comprend et nous accepte comme Roadrunner le fait.

Vous avez joué l’été dernier dans de nouveaux festivals comme le Download ou bien encore le Hellfest qui ne sont pas particulièrement des endroits idéaux pour Dream Theater. Comment as-tu vécu ça ?

C’est un peu bizarre de faire les festivals car ce n’est pas le meilleur environnement pour voir un concert de Dream Theater. Nous avons l’habitude d’emporter avec nous notre propre jeu de lumière, notre son et nos écrans géants. Et nous avons aussi l’habitude de jouer devant notre public. L’environnement d’un festival n’est donc pas idéal pour un concert de Dream Theater mais d’un autre côté il y a toujours le fan de metal qui sommeille en moi et qui aime faire les festivals pour traîner avec les autres groupes et les regarder en concert. Je dirai donc que les festivals sont amusants mais pas forcément bons pour Dream Theater. Concernant le Download Festival, nous avons fait un super concert. Le public était à fond dedans. Nous ne savions pas trop à quoi nous attendre sur ce festival car nous sommes assez éloignés des groupes typiques de l’affiche du Download. Mais au final ce fut un concert incroyable. A l’inverse, le Hellfest a été un de nos moins bons concerts en France. Habituellement le public français est toujours incroyable avec nous mais au Hellfest je n’ai pas ressenti la connexion que je ressens normalement avec le public français.

De plus j’ai entendu de drôles d’histoires niveau organisation…

(Sourire ironique qui en dit long) Je suppose que ces histoires font honneur à la réputation de l’organisation...

En plus d’un nouveau label vous avez travaillé avec une nouvelle personne pour le mixage de l’album. Comment était ce de bosser avec Paul Northfield ?

C’était bien. Paul est un type super pour bosser. Il a un caractère facile et beaucoup d’expérience. Il a contribué a pas mal d’idées et nous a apporté quelques techniques. C’était rafraîchissant de travailler avec quelqu’un de nouveau dans l’équipe. Nous n’aimons pas faire tout le temps la même chose. Parfois nous aimons tout secouer et essayer quelque chose de différent.

Toujours pas intéressé par une personne extérieure au groupe pour produire un album ?

Il ne faut jamais dire jamais, car tout est possible, mais au jour d’aujourd’hui je n’ai absolument aucun intérêt à utiliser les services d’un producteur. J’aime avoir le contrôle total de notre musique.

« Octavarium » est un album au concept ambitieux. On dirait que « Systematic Chaos » n’a pas vraiment de concept. Est-ce en réaction à l’album précédent ?

Absolument. Comme j’ai dit précédemment nous ne voulons pas toujours faire la même chose. Chaque album est une réaction à l’album précédent. « Octavarium » était tellement dirigé par l’idée de concept. C’était bon de changer la mixture cette fois ci en bossant sur les chansons de façon individuelles.

Quel est le sens du titre « Systematic Chaos » ?

Je pense que ce titre résume bien la façon dont notre musique est écrite et la façon dont elle sonne. D’un côté notre musique sonne de façon chaotique, dingue et abstraite et d’un autre côté tout ceci est complètement contrôlé. Tout est écrit de façon méticuleuse même si cela peut paraître abstrait en surface. C’est juste une phrase cool qui résume bien notre style.

Es tu d’accord avec moi si je dis que cet album a un peu le même esprit qu' « Awake » et « Train Of Thoughts » ?

Je peux voir clairement une similitude avec « Train Of Thoughts ». Avec « Awake » je ne sais pas vraiment. Je ne vois pas particulièrement de comparaisons possibles. « Systematic Chaos » a sans aucun doute le côté sombre et heavy de « Train Of Thoughts » mais c’est combiné en quelque sorte avec le côté épique et progressif d’ « Octavarium ». Personnellement je vois « Systematic Chaos » comme un croisement entre « Train of Thoughts » et « Octavarium ». Mais c’est difficile pour moi d’être objectif.

« Awake » était également un album plutôt heavy…

Les gens le voient ainsi car John utilisait pour la première fois une guitare 7 cordes et parce qu’il y a The Mirror et Lie dessus. Mais lorsque tu penses à Scarred, Lifting Shadows Off A Dream, Space-Dye Vest et The Silent Man tout ça n’est pas du tout heavy. Il y a de tout dans « Awake ». D’ailleurs nous essayons toujours de mettre un peu de tout dans nos albums.

Pourquoi avoir séparé en 2 parties le titre In The Presence Of Enemies ?

Parce que je ne voulais pas mettre un titre de 25 minutes en ouverture de l’album. Je pense que c’est trop long à surmonter en ouverture et que les gens n’auraient pas prêté attention au reste. Je ne voulais pas non plus terminer l’album avec un titre de 25 minutes car nous l’avons déjà fait la dernière fois avec Octavarium. La meilleure chose à faire était de séparer le titre en 2 parties comme ça nous pouvions commencer et terminer l’album avec. Mais nous le jouons en un seul morceau en concert.

Au niveau du son de la batterie, j’ai remarqué qu’il varie beaucoup selon les titres. Le son de la grosse caisse est par exemple assez différent sur Constant Motion et The Dark Eternal Night. Est-ce juste une question de mixage ou as-tu expérimenté diverses choses à la batterie ?

C’est le mixage. Constant Motion et The Dark Eternal Night ont été mixés de façon à ce que la grosse caisse paraisse plus lourde. Lorsque nous mixions ces 2 titres en particulier, je me souviens que je faisais écouter du Lamb Of God et du Pantera à Paul Northfield pour qu’il ait une idée du son que je voulais. Pour ces titres, nous avons modelé le son de la grosse caisse à partir de ces groupes. La batterie doit vraiment être en avant sur ce genre de titres. Si tu écoutes Slayer, Lamb Of God et Pantera c’est toujours comme ça. La grosse caisse est toujours très forte.

En parlant de Constant Motion, ce titre relate apparemment ta suractivité dans le milieu de la musique. As-tu l’impression de devenir fou parfois ou arrives tu au contraire à gérer tout ça facilement ?

Non je suis complètement fou (rires). C’est assez dément comme rythme mais j’ai constamment quelque chose qui me traverse l’esprit. Ce titre parle de ça.

Tu chantes beaucoup sur cet album. Tu fais des chœurs depuis la période de « Falling Into Infinity » mais je pense que « Systematic Chaos » est l’album sur lequel on entend le plus ta voix. Est-ce un élément que tu veux pousser plus loin dans l’avenir ?

Oui c’est probablement l’album sur lequel je chante le plus mais je fais pas mal de vocalises depuis 4 ou 5 albums. Dans Glass Prison il y avait déjà pas mal d’allers et retours entre moi et James. Ca fonctionne bien sur les titres les plus heavy car James a une voix aigue. Il a une voix d’opéra et il ne peut pas vraiment chanter de façon grave avec conviction. Ma voix aide à apporter un équilibre et une paire de couilles aux titres les plus heavy ! Toutefois je ne peux vraiment pas chanter plus que ce que je fais déjà.

Quelle est en général ta contribution aux mélodies vocales ?

J’apporte une énorme contribution aux mélodies vocales. J’écris 100% des mélodies vocales sur les titres dont j’ai écrit les paroles. Dans cet album, il y a donc mes mélodies sur Constant Motion et Repentance. Mais j’écris également beaucoup de mélodies vocales pour les titres dont je n’ai pas écrit les paroles. En tant que co-producteur avec John, nous sommes très impliqués dans toutes les mélodies.

Comment es tu arrivé à avoir tous ces invités prestigieux sur Repentance ?

J’ai envoyé un email à 15 ou 20 amis que j’avais en tête. Il y en a 11 qui m’ont répondu et qui ont voulu le faire. Je leur ai expliqué le sens des paroles. Je leur ai dit qu’il fallait qu’ils incarnent un homme en train de s’excuser à quelqu’un. Un homme qui ressent des regrets à propos de ce qu’il a fait de mal. Ils ont eu la liberté de dire ce qu’ils voulaient. Ils m’ont tous envoyé leur piste via Internet et j’ai assemblé le tout.

Ce titre fait parti de la longue série consacrée aux 12 étapes de ton circuit chez les A.A (ndlr : alcooliques anonymes). C’est le premier de la série qui est calme, ambiant et mélodique et il a une ambiance plus profonde que les autres. Etait ce une étape spéciale pour toi ?

Le côté calme de ce titre n’est pas vraiment du à l’étape du parcours ou aux paroles en elle même mais bien plus au fait que nous allons devoir jouer un jour toute cette série d’une traite en concert. Il faudra bien qu’il y ait une pause dans cette suite. Pas seulement pour nous mais aussi pour le public. Lorsque tu assembles les 3 premiers morceaux de cette suite, cela fait déjà 40 minutes d’intensité maximale  ! La suite avait besoin de respirer sur ce 4ème titre. Il ne reste plus q’un titre à écrire et cette longue pièce sera finalisée.

Il est sans doute trop tôt pour en parler, mais comment allez vous faire pour jouer cette série d’un trait en concert. Allez vous couper certaines parties ? Par exemple j’imagine mal l’intro de The Root Of All Evil balancée en plein milieu d’une longue suite…

Oui je vois ce que tu veux dire. L’intro de The Root Of All Evil sonne vraiment comme le début de quelque chose. Mais on va se débrouiller pour que ça fonctionne !

Dream Theater n’est certainement pas un groupe politique, mais vous écrivez tout de même depuis le 11 septembre 2001, un titre en rapport au conflit actuel sur chaque album avec The Great Debate, In The Name Of God, Sacrified Sons et maintenant Prophets Of War

C’est juste mais dans tous les titres suscités, les textes sont écrits soit par John soit par James. Je ne peux pas parler à leur place. Personnellement je n’éprouve aucun intérêt envers la politique, c’est pourquoi je n’écris rien à propos de ça. Apparemment ils aiment bien ce genre de sujets donc ils en parlent.

Penses tu que les textes de Dream Theater sont souvent négligés à cause de votre technique musicale ?

Peut être mais je n’ai aucun problème avec ça vu que je suis ce genre d’auditeur. Lorsque j’écoute mes groupes favoris, je me focalise toujours sur la musique en premier lieu. C’est seulement après un long moment que je commence à m’intéresser aux paroles.

Je pensais que Jordan Rudess allait utiliser davantage tous ces nouveaux jouets sur « Systematic Chaos ». Je m’attendais à entendre plus de continuum, de guitare slide et de son immense clavier analogique. Mais ce n’est pas vraiment le cas. Une raison particulière ?

Je ne sais pas vraiment mais je trouve qu’il y a quand même pas mal de continuum dans l’album. C’est plus une question qui le concerne directement. Jordan a évidemment utilisé pas mal de ses jouets car il avait beaucoup de claviers différents en studio pour créer ses sons. J’aime tous les sons vieille école qu’il y a dans cet album comme le Mellotron et le Hammond B3. J’adore ce genre de trucs mais Jordan est vraiment à fond dans la technologie et préfère tout ce qui est moderne.

En parlant matos, joues tu toujours sur le même kit ?

Non j’ai changé. Je joue désormais sur le Mirage Monster. C’est un double kit couleur claire et acrylique.

J’ai entendu parler d’une journée consacrée à Dream Theater dans l’Utah. C’est assez dingue. Comment cela s’est il passé ?

Le gouverneur de l’Utah est un fan de Dream Theater. C’est génial. C’est un honneur. Il est venu voir le concert et nous a remis une plaque pour commémorer cette journée consacrée à Dream Theater. C’était cool !

Vous avez vraiment sorti beaucoup de live ces dernières années, « Score » représentant une sorte d’apothéose avec l’orchestre symphonique. Maintenant que vous jouez des concerts plus courts, je suppose que vous n’allez pas sortir prochainement un nouveau live…

Non je ne pense pas. Ca n’arrivera pas sur cette tournée. Bien sur il ne faut jamais dire jamais ! En tout cas il n’y a aucun projet pour le moment.

Il y a pas mal de nouvelles choses sur Ytsejam Records. Peux tu présenter tout ça à mes lecteurs ?

Il y a un DVD qui est une diffusion TV d’un de nos concerts donnés en 2002. Il s’agit de la seule tournée qui ne possède pas de DVD live officiel. J’ai pensé que ça serait cool de sortir ce DVD pour célébrer et commémorer cette tournée. Ensuite il y a 3 nouveaux albums CD. Le premier concerne les démos de « Falling Into Infinity ». C’est un double CD sur lequel on retrouve absolument tous les titres que nous avons composés pour cet album, dont 6 avaient été écartés au final, et on retrouve parmi ces titres la version originale de Metropolis Pt.2. Puis il y a un live datant de 1993 où nous avons joué pour la première fois en public le titre A Change Of Seasons avec du chant et enfin il y a le « Made In Japan », mixé par Roger Glover et qui est notre hommage à Deep Purple.

Au sujet des albums hommage, j’ai remarqué qu’il n’y a aucune ville sur cette tournée dans laquelle vous allez jouer 2 soirs de suite. Veux tu arrêter de faire ces hommages live ?

Non pas du tout. Je ne veux pas abandonner cette tradition. J’aime cette tradition. C’est très amusant. Mais cela réclame que nous jouons 2 soirs de suite dans la même ville, ce qui n’est pas le cas sur cette tournée.

Penses tu qu’il y aura une autre tournée européenne en promotion de « Systematic Chaos » ?

Je ne pense pas. C’est déjà la seconde fois que nous venons défendre cet album en Europe. Nous devons passer le reste de la tournée à couvrir le reste de la planète. La planète Terre est grande, ça prend donc un long moment pour aller partout !

Il y a l’album « Spontaneous Combustion » de Liquid Trio Experiment  qui sort bientôt. Peux tu m’en toucher quelques mots ?

C’est un album rempli de jams que Jordan Rudess, Tony Levin et moi-même avons fait alors que nous bossions sur Liquid Tension Experiment 2. La femme de John Petrucci venait d’avoir un enfant, il nous avait donc quitté et nous étions à 3 pendant 2 jours dans le studio. Nous avons jammés pendant des heures et certaines de ces jams se retrouvent sur cet album. Il y a des trucs incroyables dessus. Ca fait longtemps que je souhaite que ça sorte. Ces titres traînent sur mon iPod depuis des années et je suis heureux que le reste du monde puisse les écouter.

Y a-t-il des choses en commun entre « Spontaneous Combustion » et « Liquid Tension Experiment 2 » ?

Non il n’y a aucune jam dans cet album en commun avec « Liquid Tension Experiment 2 ». Par contre Chewbacca, Liquid Dreams et un autre titre de « Liquid Tension Experiment 2 » proviennent de ces jams. Nous avions juste rajouter de la guitare par-dessus. J’ai écris des notes dans le livret de l’album pour expliquer de quoi il s’agit.

Une question stupide pour finir. Penses tu que les New York Knicks vont enfin faire une bonne saison NBA cette année ?

(Hilare) Je n’en sais rien du tout. Je serai trop occupé en tournée, je n’aurai pas le temps de les suivre !

Merci à Mike Portnoy ainsi qu'à Dirk de CNR Records et Rick le tour manageur de Dream Theater.