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PRONG

Entretien avec Tommy Victor (chant, guitare)

10/01/08 - Locomotive - Paris

 

La reformation de Prong en 2002 avait généré un certain enthousiasme, mais après avoir sorti le décevant "Scorpio Rising"et avec l'implication de son leader Tommy Victor du côté de Ministry et Danzig, le buzz était redescendu comme un soufflet laissant Prong retomber dans l'oubli. Le groupe est aujourd'hui de retour contre toute attente, de façon assez confidentielle certes, mais cela fait toujours plaisir de retrouver cette formation avant-gardiste qui n'a jamais réussie à trouver le succès qu'elle mérite. C'est le sympathique maitre à penser Tommy Victor qui parle de l'actualité du groupe au cours d'un entretien écourté, la faute à un planning très en retard !

Salut Tommy ! L’attente aura été longue pour entendre un nouvel album de Prong. Pourquoi ?

Parce que je suis fainéant ! Non en fait j’étais occupé sur pas mal d’autres trucs. J’ai l’impression que le temps passe vite maintenant. Lorsque j’étais jeune une période de 6 mois me semblait très longue alors qu’aujourd’hui je ne vois même plus passer les années. Il y a aussi le fait de ne plus avoir de contrat chez une maison de disque qui a bien ralenti les choses.

Comment as-tu gérer le fait d’enregistrer les albums de Prong et Ministry au même moment ?

J’ai du effectivement faire pas mal d’allers et retours entre El Paso et Los Angeles. Il y a certaines périodes où je me suis consacré uniquement à l’un ou l’autre. J’avais quelqu’un pour s’occuper de mon emploi du temps car l’organisation de son temps est toujours un problème aujourd’hui lorsque tu travailles sur un projet. On aurait très bien pu faire l’album de Prong plus tôt mais ce n’est pas toujours évident de réunir tout le monde au même moment.

Ministry est un groupe clairement politisé aujourd’hui. Avais-tu envie d’exprimer des choses plus personnelles dans cet album de Prong ?

Je pense que j’exprime un peu le même genre de chose que dans les vieux albums de Prong. Il y a toujours un contenu un peu politique mais exprimé de façon plus personnelle. Je parle davantage de rébellion, de manque d’assurance et de peur envers la façon dont le monde évolue plutôt que de pointer clairement du doigt ce qui te rend craintif. Le monde est chaotique est les albums de Prong sont une réponse à ça. Mais je n’ai jamais été du genre à me focaliser sur un problème en particulier et à le critiquer dans mes paroles. Il y a plus de mystère chez Prong.

Tu reviens sur « Power Of The Damager » à la formule du power trio. Avec le recul, penses tu qu’il était inutile d’avoir un second guitariste dans Prong ?

Je ne sais pas vraiment si c’était inutile ou bénéfique (rires). Plus sérieusement je pense que c’est mieux pour Prong de revenir à son ancienne formule. Ca a plus de sens numériquement. Je n’avais plus vraiment confiance dans mon jeu sur scène à l’époque. C’est pourquoi nous avons utilisé une seconde guitare. Mais j’ai repris confiance en moi depuis et avec Monte et Aaron, il nous est possible de sonner à nouveau de façon incroyable en trio. Je pense que nous n’aurions pas été capables de sonner aussi bien avec notre ancien batteur et notre ancien bassiste. Ca dépend beaucoup de qui est impliqué dans le groupe en fait. Par exemple nous avions Mike Kirkland à la basse aux débuts du groupe. Son jeu était suspect et il était critiqué régulièrement. C’était un bon compositeur, un bon chanteur et il avait vraiment de bonnes idées mais il ne jouait pas vraiment bien en live. Mais avec un mec comme Monte qui joue vraiment bien de la basse, nous pouvons sonner vraiment bien en restant en trio.

En parlant de Monte Pittman. Comment le guitariste de Madonna peut être amené à jouer de la basse dans Prong (rires) ?

Je n’en sais rien ! C’est un mec étrange ! Il est clair qu’il ne gagne pas autant d’argent en jouant avec nous. Il est un peu dingue. Mais je trouve ça très flatteur et je suis heureux qu’il puisse être capable de jouer avec nous.

Au moins on peut dire qu’il est là pour la passion. Car j’imagine évidemment que son cachet est incomparable avec celui qu’il touche avec Madonna…

Il est là pour le sexe je pense (rires).

Prong était réputé pour avoir une production massive auparavant. En opposition « Power Of The Damager » sonne vraiment de façon très brute et plus organique. Etait ce voulu ?

Oui totalement. C’était réfléchi. Beaucoup de décisions ont été prises en fonction du temps dont nous disposions pour enregistrer. Je me suis juste assuré que les titres soient vraiment bons et que le chant soit le meilleur possible. Je pense que ces nouvelles chansons ne demandent aucun excès en termes de production. Dans ce cas précis, de tels excès n’auraient pas pu être recrées en live en jouant dans le sous sol de la Locomotive. Nous allons jouer dans des trous à rat dotés d’une sonorisation déplorable sur la plupart des shows de cette tournée ou bien dans des clubs où tous les overdubs en studio sont difficiles à recréer car nous utilisons les ingé son de la salle et ils ne connaissent pas forcément nos chansons. Ca aurait donc été une mauvaise idée de surproduire cet album. Nous nous sommes juste assuré que les titres soient bons et qu’ils sonnent bien à la base. Je sais que dans le passé j’avais toujours beaucoup d’idées pour rajouter tel ou tel effet sur une partie de guitare ou pour créer plusieurs couches dans les morceaux. Bien sur j’aurai très bien pu prendre une semaine pour rajouter quelque samples ou mettre quelques overdubs de guitare, mais ça ne m’a pas semblé nécessaire cette fois et ça rend l’interprétation live plus facile.

Il y a une multitude de groupes qui ont été influencés par Prong et beaucoup d’entre eux sont bien plus gros que vous. Es tu fier de cela ou es tu un peu amer lorsque tu y penses ?

Ca dépend à quoi tu évalues le succès. Ca change souvent. Lorsque je regarde mon compte en banque, on peut dire que j’aimerai bien avoir le même succès que certains groupes que j’ai influencé (rires). Mais d’un autre côté je connais pas mal de musiciens qui jouent dans de gros groupes et qui sont malheureux. Jouer dans un groupe énorme ne te rend pas heureux pour autant. Tout ce que je sais, c’est que j’ai crée Prong pour le fun au début. Nous venons d’une ère où les groupes jouaient pour le plaisir au lieu de jouer pour vendre le plus d’albums possible. Nous avons seulement pris conscience de ce que nous étions en train de faire au moment où la presse s’est intéressée à nous. Le succès est quelque chose de vraiment dur à définir. J’aimerai bien rouler en Ferrari mais ce n’est pas possible et ce n’est pas vraiment grave.

Prong a au moins le bénéfice d’avoir une histoire et un héritage…

Oui mais je minimise également cet aspect. Je ne suis pas très intéressé par la gloire. Lorsque tu es gamin tu penses qu’en jouant dans un groupe tout le monde te mettras sur un piédestal et que tout le monde ta baiseras le cul. Mais en réalité tout cela n’existe pas vraiment. C’est de la fantaisie.

D’une certaine manière, on peut dire que Prong existe grâce au CBGB’s car tu bossais là bas aux côtés de Mike Kirkland avec qui tu as fondé le groupe il y a un peu plus de 20 ans. Quelle a été ton sentiment lorsque ce club mythique a fermé ses portes fin 2006 ?

Pour moi ce club avait fermé ses portes depuis bien longtemps. Je ne vis plus à New York depuis un bon moment. Je trouve que ce club était devenu une sorte d’attraction touristique depuis le milieu des années 90. L’esprit originel n’était plus là. Pendant les années 70 et les années 80, ce club avait vraiment un sens particulier. Même lorsque je pense à la vague hardcore de la fin des années 80, je trouve que le CBGB’s n’était déjà plus une partie intégrale de la musique. C’est un bon exemple pour montrer comment les choses évoluent aujourd’hui. Tous ces anciens clubs n’ont plus vraiment d’importance. Internet semble être le seul véhicule pour tous les petits groupes. Le seul moyen d’exposer sa musique. Les choses sont ainsi, sans même parler du fait que cela soit bon ou pas. Je suis personnellement un gros fan de l’expérience live dans les clubs. J’aime l’interaction dans ces endroits là. J’aime cette ambiance. Mais aujourd’hui il semble qu’il y ait de plus en plus de restriction dans ces clubs. Dans la consommation d’alcool par exemple. Alors qu’avant personne ne se souciait de ça. Les temps changent. Les clubs arrivent toujours à survivre aujourd’hui mais le CBGB’s n’a pas pu car New York est une exception. Cette ville est devenue trop chère pour pouvoir monter son business. C’est malheureux mais c’est ainsi. Pour revenir sur le CBGB’s, le propriétaire Hilly (ndlr : Hilly Kristal a fondé le CBGB’s en 1973) est mort peu après la fermeture du club car cela représentait toute sa vie. Il a donné l’opportunité à plein de musiciens, moi y compris, de pouvoir vivre de leur musique. Je lui tire mon chapeau.